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Affichage des articles du avril, 2020

[Chronique de l'après] Maisons de repos : la mort, sans l’intention de la donner

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Les maisons de repos, où on imaginait que nos aîné·e·s passeraient des jours tranquilles, sont devenues pour eux et pour elles, malgré le dévouement du personnel à qui nous les avions confié·e·s, des pièges mortels. En Belgique, la proportion de personnes décédées du coronavirus dans les maisons de repos serait sensiblement plus élevée que les pays voisins. Notre pays, qui dispose sans doute d’une des meilleures médecines publiques du monde, a considéré comme un progrès social le fait d’isoler toute une génération dans des espaces confinés qui apparaissent aujourd’hui comme des mouroirs. Mais comment en sommes-nous arrivés là ? Dans les cultures traditionnelles, les plus fragiles étaient pris·es en charge par les communautés naturelles : la famille élargie, le clan, le village. Puis le capitalisme s’est mêlé de réorganiser la production. Plus question de faire « un peu de tout » dans une économie artisanale sans objectif de rentabilité. Le progrès des sciences et des techniques

[Chronique de l’après] Le virus et le métro

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C’était il y a un an. À Bruxelles, la campagne électorale battait son plein. On pressentait un axe Ecolo-PS au gouvernement bruxellois. Pourtant, ces deux partis étaient en franche opposition concernant la nouvelle ligne du « métro nord ». Le PS y tenait mordicus et avait multiplié les faits accomplis à la fin de la législature précédente, approuvant les études d’incidence et accordant les permis d’environnement, notamment pour la nouvelle station destinée à remplacer l’arrêt Lemonnier. Pour Ecolo, qui relayait la plupart des critiques des  associations environnementales  bruxelloises et de  nombreux experts , ce projet risquait d’épuiser toutes les marges budgétaires. Plus un euro ne serait disponible pour les aménagements destinés à améliorer le réseau de surface auxquels les Verts étaient attachés. Cette opposition déboucha sur un accord politique des plus bizarres. Comme aucun des protagonistes ne voulait renoncer, la nouvelle majorité bruxelloise s’engagea… à faire à la fois le m

[Chronique de l’après] L’alliance ambiguë des «décideurs»

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Le confinement crée des vocations. On est submergé de cartes blanches ou de libres opinions qui tirent des leçons de la crise sanitaire, afin que le monde d’après ne soit pas la reproduction de celui d’avant. Celle que j’épinglerai ici a été publiée dans  La Libre  du 14 avril sous le titre :  180 personnalités réclament un plan de relance verte pour un monde durable . Parmi les signataires, on trouve un paquet de ministres en exercice, une collection d’europarlementaires, surtout libéraux et macroniens (Renew Europe) mais aussi socialistes et verts, dont certains que j’estime particulièrement comme Pierre Larrouturou (S&D) et Philippe Lamberts (Verts). Ont également signé le président et les secrétaires généraux de la Confédération européenne des syndicats, mais aussi le PDG du groupe L’Oréal, le PDG de Danone, le PDG d’Unilever, le directeur général du groupe Suez, le PDG d’Umicore, le président d’Inbev, zone Europe, le PDG de Saint-Gobain, le président de Coca-Cola pour l’Eur

[Chronique de l'après] La fracture anthropologique

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Boris Johnson : bien fait pour sa pomme ! J’ai un peu honte, mais c’est exactement ce que j’ai pensé en apprenant l’hospitalisation du Premier ministre britannique pour cause de contamination sévère au Covid-19. (Comme il a l’air de s’en sortir, je peux l’avouer.) Quelques jours auparavant, il se faisait filmer dans la foule en train de serrer des mains, sans gants, en propageant le virus dont il était peut-être déjà porteur. Lui, Donald Trump, le Néerlandais Mark Rutte, le Brésilien Jaïr Bolsonaro et, au moins dans un premier temps, Bart De Wever appartiennent à la même engeance. Persuadés sans doute de faire partie de la race des surhommes, ils ont commencé par ricaner : ce virus exotique, c’était juste une mauvaise grippe. Après quoi tous ont rechigné devant les mesures de confinement qui risquaient de faire souffrir leur économie sur la scène majeure de la compétition universelle. Certains ont prétendu miser uniquement sur l’immunité collective sans autre mesure de protect

[Chronique de l’après] Et pour les Flamands la même chose ?

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La société gronde : quand nous serons sorti·e·s de cette épreuve, pas question de faire comme si c’était juste une parenthèse et d’en revenir à un  business as usual  insupportable. Même des idéologues du monde bancaire virent leur cuti et s’expriment désormais comme de vulgaires sociaux-démocrates vantant les mérites d’une puissance publique forte et de services publics bien financés. Ne soyons pas dupes. Ce ne sont pas ces idéologues qui forgent les lois du marché, ils ne font que les commenter. Si on n’arrive pas à les briser ou à tout le moins les brider, les forces aveugles qui président à l’accumulation du capital ne peuvent pas faire autrement que d’imposer leur logique infernale. Le darwinisme social reste leur moteur : mort aux faibles. Darwin a bon dos… Changer de logique impose d’inverser les rapports de force. Sur le plan politique, les dernières élections ont indiqué les tendances. À l’exception remarquable de la Wallonie et de Bruxelles (et de mon cher Portugal